CAPSULE VIN - Samedi 30 mars 2024
Morgon
Je vous amène aujourd’hui où de très bons vins côtoies des prix encore très sympathiques, en Beaujolais, dans le village de Villié-Morgon, la seule commune autorisée pour l’appellation Morgon. On voit ici la Côte du Py, en arrière du village, un des lieux-dits de Morgon.
La présence de la vigne à Villié-Morgon est attestée par un acte de vente d’une parcelle par le sire de Beaujeu à un vassal en l’an 956. À partir de la fin du XVe siècle, la bourgeoisie lyonnaise, enrichie par la soierie et la banque, développe le vignoble. Réputés et recherchés, les vins de Morgon sont reconnus en A.O.C. en 1936.
La zone géographique de Morgon s’étend sur la bordure orientale des monts du Beaujolais. Le paysage très vallonné a été façonné et est drainé par la rivière Douby, la rivière Morcille et leurs affluents qui descendent du fût d’Avenas (762 mètres d’altitude), montagne au sommet boisé et qui s’écoulent vers la vallée de la Saône en contrebas.
Comme vous savez, Morgon est l’in des 10 crus du Beaujolais. Un Morgon se doit de ``morgonner``, lorsque ses arômes de fruits mûrs à noyau se déploient délicatement dans le palais. Grâce à son sol étonnant, il se doit d’être le plus dur, le plus corsé et le plus minéral des Beaujolais. Le mont de Py, qui culmine à 352 mètres, offre sur ses coteaux les meilleurs terroirs : un composé de minces couches de roches volcaniques et schisteuses riches en manganèse et gorgées d’oxyde de fer que l’on appelle Morgons.
Résultat, une terre ocre, une terre pourrie * que l’on dit là-bas et qui se désagrège rapidement. Par cette terre, le Morgon capte sa propension à bien vieillir. Ce superbe vignoble de 1100 hectares est, après Brouilly, le plus étendu des 10 crus du Beaujolais. Morgon est situé sur le côté ouest de la Saône, au cœur des crus. À 50 km au nord de Lyon et de 20 km de Mâcon. *ce qu’on appelle roche pourrie, terre pourrie ou Morgon, est une altération très avancée des schistes et des roches éruptives.
Sols de roches cristallines altérées (schistes pyriteux) avec plus ou moins d’argile. Depuis 1985, afin de mieux préciser la provenance des cuvées, l’aire d’appellation est divisée en 6 climats formant 6 entités homogènes tant au point de vue du terrain que de l’exposition.
Les Charmes : orientés au sud-est entre 300 et 450 mètres, sur des arènes granitiques donnant des vins très parfumés et ronds.
Corcelette : au nord-ouest de l’appellation étagé de 300 à 400 mètres sur un terroir granitique léger en surface, ce climat donne des vins au parfum de fruits rouges, robe rouge violacée.
Côte du Py : sur la colline du Py, culminant à 350 mètres, le sous-sol d’origine éruptive et de roche basaltique confère à ses vins des arômes de cerise avec des notes épicées. Corsés, ils ont un bon potentiel de garde.
Douby : climat adossé aux coteaux de Fleurie, vin corsé et harmonieux, riche en fruit.
Grand Cras : à une altitude moyenne de 260 mètres, sur les contreforts sud et sud-est de la côte du Py, ce terroir schisteux produit des vins corsés avec des notes de kirsch.
Les Micouds : le plus petit des climats en superficie, orienté au soleil levant, de nature assez précoce, il allie finesse et tanins bien fondus.
Morgon les Charmes.
Morgon Côte du Py (avec le fameux chêne au sommet)
Le Gamay
Ancré sur le territoire depuis le début du XVIIe siècle, son histoire est commune à celle du vignoble. Il a trouvé ici un écrin pour développer toutes les finesses et les multiplicités de son expression. Visuellement, ses grappes à la peau fine noire violette, sont cylindriques et compactes, bordées de feuilles planes et peu découpées. Les sols granitiques sont a priori sa terre d’élection mais il a l’art de s’adapter. Historiquement, avant le phylloxera, le cépage était très répandu en France. On estime qu’il couvrait plus de 160 000 hectares. Aujourd’hui, la moitié des 30 000 hectares de gamay plantés à travers le monde le sont en Beaujolais, où il couvre 98 % des surfaces qui produisent du Beaujolais. Né d’un croisement naturel de pinot noir et de gouais blanc, le cépage gamay noir à jus blanc permet l’élaboration de vins au fruit multi facette : d’un « fruité joyeux » pour les Beaujolais de Fête et donc le « Nouveau », jusqu’à un « fruité complexe » pour les Beaujolais d’Exception, en passant par un « fruité racé » pour les Beaujolais de Caractère. D’une grande amplitude, il est capable de produire aussi bien des vins très élégants dans leur jeunesse que des vins de garde. Résolument moderne, il permet d’élaborer des vins peu alcoolisés, fruités et souples. Cépage précoce, il offre des vins d’une belle couleur rouge, souvent vive et éclatante, avec des parfums à dominante fruitée (framboise, fraise des bois, mûre, cerise noire) ou parfois, poivrées et florales.
Le gamay nécessite un travail minutieux. Plus les ceps sont nombreux sur une parcelle, plus le gamay est prolifique. Il faut donc le dompter pour réajuster l’équilibre entre quantité et qualité des raisins. La taille courte, en gobelet, est l’une des méthodes qui permet d’encadrer au mieux le cépage bien que l’on observe désormais la pratique grandissante d’autres techniques (éventail, cordon simple, etc.). Les vignerons du Beaujolais l’ont bien compris et ont su nourrir au fil des ans une expérience imparable pour maîtriser sa fougue naturelle et en faire surgir le meilleur.
Depuis 2010, Inter Beaujolais, l’Interprofession des vins du Beaujolais, promeut le gamay en organisant le Concours International du Gamay. Un rendez-vous destiné à renforcer l’image et la notoriété de ce cépage auprès des consommateurs et des producteurs du monde entier.
Dans le vignoble, Les vins issus du gamay sont principalement rouges mais il se décline également en vins rosés sur les appellations Beaujolais et Beaujolais Villages. Du nord au sud, Le gamay agit en fil conducteur des 12 appellations du vignoble Beaujolais. Il s’exprime en nuances sur des terroirs pluriels pour séduire et fasciner les amateurs du monde entier.
Le Chardonnay
C’est l’un des trésors méconnus du Beaujolais : le vin blanc. C’est le cépage blanc le plus planté dans le monde. En territoire Beaujolais, le chardonnay dévoile de belles expressions. On le trouve à l’extrême nord du vignoble, aux limites du Mâconnais et au sud-ouest de Villefranche-sur-Saône. Il bénéficie d’un écrin en forme de triangle entre Liergues, le Bois d’Oingt et Bully. Au sein des appellations beaujolaises, le chardonnay représente aujourd’hui 2 % du vignoble. De plus en plus de vignerons produisent des blancs, tant ils séduisent les papilles. Ses grappes se présentent en petites baies à peau blanche et fine, arrondies et dorées à maturité. La diversité des sols du vignoble offre à ce cépage la capacité d’exprimer toute sa richesse et sa complexité. Il s’épanouit notamment sur des terrains marneux ou calcaires. Les terres peu fertiles constituent ainsi son environnement de prédilection. Dans les zones tempérées, comme en Beaujolais, il donne ainsi des vins souples et charnus aux arômes d’agrumes ou de fruits blancs telle que la pêche. En cave, le chardonnay est pressuré dès son arrivée et fermente ensuite pendant une quinzaine de jours en cuve, en fût ou en foudre. Les élevages sur lies sont fréquents. Les Beaujolais et Beaujolais-Villages blancs offrent des vins équilibrés avec fraîcheur, rondeur et finesse. Les Beaujolais blancs sont dotés d’une belle robe dorée et sont amples, aux arômes de fruits à chair blanche et d’agrume, avec une finale agréable. Les Beaujolais-Villages blancs se distinguent quant à eux par leurs notes florales, minérales, et leur belle intensité aromatique. Certains vins peuvent vieillir quelques années en cave pour exprimer leur complexité et leur intensité. Beaucoup de producteurs incroyables sont disponibles à la SAQ dont, Guy Breton, Marcel Lapierre, Chamonard, Julien Sunier et autres mais mon préféré demeure Jean Foillard. Si son Morgon village laisse parfois à désirer, son Corcelette et surtout Les Charmes Éponyme sont intenses et complexes.